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Lycée horticole de Dardilly Agrivoltaïsme dynamique : conjuguer protection des cultures et production d’électricité renouvelable

A l’exploitation du lycée de Dardilly, cinq cents panneaux photovoltaïques mobiles ont été installés début 2023, à six mètres au-dessus d’une parcelle de pépinière hors sol et de deux parcelles de petits fruits (framboises hors sol et fraises pleine terre bio).

Le lycée horticole de Dardilly (69) a fait installer des panneaux photovoltaïques sur des cultures en extérieur avec des objectifs techniques, expérimentaux et pédagogiques.

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Les périodes de forte chaleur désormais coutumières chaque été ne sont pas sans conséquences sur le développement des plantes et la production agricole, ce qui contraint à trouver des solutions innovantes pour garantir le revenu des agriculteurs. L’agrivoltaïsme dynamique, qui associe production d’énergie renouvelable et ombrage contrôlé des cultures, pourrait faire partie de ces solutions.

Jeudi 28 septembre, au lycée horticole de Dardilly, Laurence Borie-Bancel, présidente de la Compagnie nationale du Rhône (CNR), Thierry Kovacs, vice-président délégué à l'environnement et à l'écologie positive de la région Auvergne-Rhône-Alpes, et Claudine Roucayrol, directrice de l’Eplefpa* Lyon Dardilly Écully, ont inauguré le projet expérimental d’agrivoltaïsme dynamique des « Parcelles du futur ». « La situation que nous vivons nous oblige à imaginer des solutions permettant de conjuguer production agricole, protection contre les intempéries, économies d’eau et production d’énergie renouvelable, déclare Thierry Kovacs. La Région prévoit une forte augmentation des surfaces photovoltaïques d’ici 2030, il faudra trouver les surfaces nécessaires. »

Installation en pépinière hors sol

Cette expérimentation est une première pour la CNR. Développée avec le soutien de la Région, elle vise à démontrer que l’ombrage apporté par des panneaux solaires mobiles installés au-dessus des zones de culture est bénéfique pour les végétaux, tout en engendrant de fortes économies d’eau. Au sein de l’exploitation du lycée de Dardilly, cinq cents panneaux photovoltaïques mobiles ont été posés début 2023, à six mètres au-dessus d’une parcelle de pépinière hors sol et de deux parcelles de petits fruits (framboises hors sol et fraises pleine terre bio). Depuis le mois d'avril, cette installation test d’une puissance de 230 kilowatts-crête (kWc) apporte un ombrage piloté tout en produisant de l'électricité renouvelable. 

Associer pour une même parcelle production agricole et production électrique photovoltaïque est susceptible de proposer des solutions économiquement viables pour les agriculteurs. C’est le cas des serres photovoltaïques que des investisseurs proposent à des pépiniéristes, horticulteurs ou producteurs de petits fruits. Ces derniers, pour un investissement réduit (coût du terrassement), disposent d’un outil performant et moderne. Cependant, l’impact des panneaux fixés sur l’ensemble des pans sud des toitures de la serre n’est pas sans conséquences. Il faut adapter le type de culture aux contraintes d’un ombrage permanent car, selon les données Astredhor, on observe une réduction moyenne de près de 45 % du rayonnement sous serre par rapport à l’extérieur.
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Protéger les plantes de la hausse des températures

L’expérimentation des parcelles du futur réalisée à Dardilly présente une finalité très différente puisqu’il s’agit avant tout de répondre aux besoins des plantes face à la hausse des températures, la protection des cultures étant prioritaire sur la production électrique. 

Pour les cultures en plein air, les panneaux, orientés est-ouest, sont fixés au-dessus des plantes sur une structure métallique de six mètres de hauteur. Les agriculteurs disposent ainsi d’un système d’ombrage automatisé sans avoir à investir dans un dispositif coûteux. L’ombrage n’est pas permanent, les panneaux sont orientables pour à la fois suivre la course du soleil et laisser passer plus ou moins de lumière et d’ensoleillement selon les besoins. Le pilotage de l’orientation des panneaux se fait à l’aide d’algorithmes et à partir de données collectées par des capteurs situés au niveau des cultures, qui mesurent luminosité, température, hygrométrie et état de stress hydrique des plantes.

Une opportunité pour l’enseignement agricole

« L’expérimentation fait partie des missions de l’enseignement agricole, c’est donc assez naturel pour nous d’être dans cette perspective d’innovation, explique Xavier Bunker, directeur de l’exploitation du lycée horticole. Cela permet de mettre les jeunes en contact direct avec le terrain et d’être plongés dans des sujets à fort enjeu comme la transition climatique. De plus, on crée une situation pédagogique qui nous oblige à sortir d’un enseignement trop vertical. Il n’y a pas de sachant et d’apprenant, nous découvrons en même temps qu’eux. En lien avec la société Sun’Agri, nous avons dû nous former au pilotage de l’installation avec la chambre d’agriculture et le CTIFL (Centre interprofessionnel des fruits et des légumes), acquérir des compétences sur la culture de petits fruits, adapter ces nouvelles connaissances aux contraintes de la structure par rapport à l’espacement des rangs, aux effets de goutte d’eau en bordure des panneaux photovoltaïques les jours de pluie… »

En plus de l’effet d’ombrage apporté par les panneaux, la structure métallique sert à accrocher divers éléments comme des filets antigrêle, des filets anti-insectes ou des bâches de protection contrer la pluie. « C’est particulièrement intéressant pour nos parcelles de petits fruits en hors-sol ou pleine terre. Les filets anti-insectes procurent une protection efficace contre les attaques de drosophiles, fréquentes sur les fruits rouges, les bâches antipluie améliorent la qualité des fruits. Au final, l’installatioest censée augmenter les rendements (réduction des pertes liées à la chaleur) et la qualité des produits tout en réduisant les coûts de main-d’œuvre et de traitement.

En plus de l'ombrage apporté par les panneaux, la structure métallique permet d’accrocher divers éléments comme des filets antigrêle, des filets anti-insectes ou des bâches de protection contre la pluie. (© Claude Thiery)

Des températures plus clémentes

Après six mois, les premières observations sous ombrière photovoltaïque ont été relevées avec, sans surprise, des températures plus fraîches liées à l’ombrage : jusqu’à 7,5 °C de moins dans les pots des plantes de la pépinière par rapport au témoin non ombragé et jusqu’à 14,8 °C de moins dans le sol pour les fraises (par rapport au témoin sous tunnel), des fruits plus rouges sous la zone agrivoltaïque de même qu’un calibre plus important. L’impact par rapport à la remontée à fruit reste à confirmer.

Plus prometteur, on constate une baisse de 45 % de l’irrigation pour les framboises hors sol par rapport au témoin sous tunnel. Cette zone témoin, malgré un arrosage plus important, est restée tout l’été à la limite du stress hydrique.

Répondre à des impasses techniques

« En pépinière, en ce qui concerne les cultures en conteneur, les effets des fortes chaleurs se font nettement sentir, poursuit Xavier Bunker. Avec des effets directs, comme des brûlures de racines côté soleil, mais aussi indirects. Les températures élevées obligent à intensifier les arrosages avec des risques d’excès d’eau sur certaines espèces comme le Choysia, très sensible au Phytophthora. Jusqu’à 50 % de pertes peuvent être constatées. Les premières observations sous ombrière photovoltaïque montrent une nette amélioration à ce niveau. »

Pour les petits fruits, Xavier Bunker note qu’il est plus simple de travailler sous la structure photovoltaïque que dans les tunnels témoins : le climat est plus facile à gérer, c’est aussi une question d’espace. Il sera intéressant dans les années à venir de voir l’impact de la structure par rapport aux gels tardifs.

La parcelle de pépinière est divisée en deux parties, l'une avec un revêtement clair, la seconde avec une toile hors-sol noire. L’impact des deux matériaux sera étudié autant vis-à-vis des plantes que posur la production électrique. Les panneaux étant bifaciaux, le revêtement clair réfléchit vers eux une partie du rayonnement solaire.  

L’expérimentation, d’une durée de trois ans, se déroule jusqu’en 2026. À son issue, les données récoltées et analysées devraient permettre de proposer aux professionnels du secteur agricole un modèle technico-économique viable et réplicable.

Lire sur le même sujet : "Photovoltaïques : les atouts du solaire gratuit"

*Établissement public local d’enseignement et de formation professionnelle agricole.

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